On se demande pourquoi peindre un alcoolique
Édouard Manet, Le Buveur d’absinthe, 1859, Ny Carlsberg Glyptotek, Copenhague
Paris, 1859. Le jeune peintre Édouard Manet est dépité. Ce débutant, encore inconnu, vient de tenter de participer au Salon.
Il a soumis au jury sa première grande toile, Le Buveur d’absinthe. Mais le refus est catégorique !
À l’époque, le Salon est l’un des seuls moyens pour un artiste de se faire connaître.
À peine sorti de son apprentissage, Manet n’a qu’une envie : obtenir la reconnaissance de ses pairs. Alors, qu’est-ce qui dans sa toile l’empêche d’entrer dans la cour des grands ?
Son sujet ne plaît pas du tout ! Le jeune Manet a choisi de peindre un chiffonnier, alcoolique de surcroît, un certain Colardet.
Un sujet un peu trop moderne, qui lui aurait été soufflé par le subversif poète Baudelaire. Cela déplait au jury conservateur du Salon... La réputation du poète sent le soufre, la toile de Manet aussi.
Napoléon 1er aux tuileries
Le peintre bouleverse les codes : malgré l’origine modeste de son modèle, Manet a opté pour un portrait en pied, habituellement réservé à l’élite. Ce choix est considéré comme étrange.
Le jury, qui défend farouchement les conventions de la peinture académique, n’apprécie pas trop.
Et cette manière de peindre, plus rapide… Est-on sûr que Manet a terminé son tableau ? Le jury estime que l’œuvre manque cruellement de finitions. Le Buveur d’absinthe est donc catalogué comme une œuvre bizarre, inachevée et scandaleuse !
Cependant, parmi les membres du jury, un seul a voté en faveur de Manet. Un vote, c’est peu. Mais il s’agit de Delacroix, peintre très reconnu et influent. C’est un véritable encouragement pour le jeune artiste !
source : artips Racontée par Anne-Laure Chaney